DESARMAMENT & SECURITE .
Un article de la Ville de Hiroshima traduit par l’AFCDRP-Maires pour la Paix France
Chaque année, le 6 août, la ville d’Hiroshima organise une cérémonie commémorative pour la paix afin de prier pour le repos paisible des victimes, pour l’abolition des armes nucléaires et pour une paix mondiale durable. Au cours de cette cérémonie, le maire publie une déclaration de paix adressée au monde entier. Le maire d’Hiroshima continuera à publier ces déclarations appelant à l’élimination des armes nucléaires de la surface de la terre afin de construire un monde de paix mondiale véritable et durable où aucune population ne connaîtra plus jamais la cruelle dévastation subie par Hiroshima et Nagasaki.
DECLARATION DE PAIX
Citoyens du monde, qu’en pensez-vous ? Des forces nucléaires plus puissantes sont-elles nécessaires pour la sécurité nationale ? Qu’en est- il des courses aux armements, où les nations rivalisent pour maintenir leur supériorité sur les autres ? L’invasion prolongée de l’Ukraine par la Russie et l’aggravation de la situation entre Israël et la Palestine font de nombreuses victimes innocentes, brisant de nombreuses vies. Il me semble que ces tragédies mondiales aggravent la méfiance et la peur entre les nations, renforçant l’opinion publique que la résolutions des problèmes internationaux doit s’appuyer sur la force militaire ; ce que nous devrions rejeter. Dans de telles circonstances, comment les nations peuvent-elles offrir sécurité et sûreté à leurs citoyens ? Cela n’est-il pas impossible ?
À travers les piliers sous le Musée du Mémorial de la Paix, nous pouvons voir le Cenotaphe pour les Victimes de la Bombe Atomique. Toute personne priant au Cenotaphe peut regarder droit à travers celui-ci jusqu’au Dôme de la Bombe Atomique. Le Parc du Mémorial de la Paix, avec ces structures sur son axe nord-sud, a été construit conformément à la Loi sur la Construction de la Ville Mémorial de Hiroshima, promulguée il y a soixante-quinze ans aujourd’hui. Construit par le peuple d’Hiroshima et de nombreux autres chercheurs de paix, il est devenu un lieu pour commémorer les victimes et réfléchir, échanger et s’engager mutuellement pour la paix.
Si, après la guerre, le Japon avait abandonné notre Constitution Pacifique et s’était concentré sur la reconstruction de notre armée, la ville de paix qu’est Hiroshima aujourd’hui n’existerait pas. En étant ici, nous pouvons tous sentir la détermination de nos prédécesseurs à éliminer le fléau de la guerre, en faisant confiance en la justice et aux résolutions pour la paix des personnes de par le monde.
En exprimant cette détermination, un hibakusha a continué inlassablement à transmettre l’esprit d’Hiroshima. « Il est maintenant temps de changer le cours de l’histoire, de dépasser les haines du passé, de nous unir au-delà des différences de race et de nationalité pour transformer la méfiance en confiance, la haine en réconciliation, et le conflit en harmonie. » Ce sentiment encourageant a été écrit par un homme qui, à 14 ans, a vu des scènes dignent de l’enfer : un bébé avec la peau décollée à vif à côté de sa mère brûlée de la tête aux pieds, et un cadavre avec ses entrailles éparpillées par terre.
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Can we abolish all nuclear weapons?
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En 1989, un immense mouvement populaire pour la démocratie a fait tomber le Mur de Berlin, symbole prédominant de la Guerre froide. Le Président Gorbatchev a exprimé le besoin collectif de paix de l’humanité et sa détermination à mettre fin à la course aux armements, au terrorisme nucléaire, à éradiquer les armes nucléaires et à rechercher sans relâche des solutions politiques aux conflits régionaux. Lui et le Président Reagan ont travaillé ensemble à travers le dialogue pour mettre fin à la Guerre froide, ce qui a conduit les États-Unis et l’Union Soviétique à conclure le Traité sur les Réductions des Armes Stratégiques. Ils ont démontré que les décideurs politiques peuvent surmonter même les situations critiques grâce à un engagement résolu en faveur du dialogue.
Ne nous résignons pas au pessimisme face à la situation chaotique du monde. Soyons plutôt déterminés comme l’étaient nos ancêtres, et, unis comme un seul Homme, avec espoir dans nos cœurs, agissons collectivement. Notre unité fera en sorte que les dirigeants, actuellement dépendants de la dissuasion nucléaire, modifient leurs politiques. Nous pouvons y parvenir.
Pour éteindre la méfiance et le doute qui créent des conflits, la société civile doit promouvoir la confiance à travers l’échange et le dialogue. Nous devons étendre au-delà des frontières nationales le sentiment de sécurité que nous ressentons dans notre vie quotidienne. L’étape cruciale ici est de partager et de nous identifier aux expériences et aux valeurs des autres à travers la musique, l’art, le sport et d’autres interactions. Par de tels échanges, créons un monde où nous partageons tous la Culture de la Paix. En particulier, j’appelle notre jeunesse, qui dirigera les générations futures, à visiter Hiroshima et, en prenant à cœur ce qu’ils y vivent, à créer un cercle d’amitié avec des personnes de tous âges. J’espère qu’ils réfléchiront à ce qu’ils peuvent faire maintenant et agiront ensemble pour élargir leur cercle d’espoir. La ville d’Hiroshima, en collaboration avec Mayors for Peace, qui compte maintenant plus de 8 400 villes membres dans 166 pays et régions, soutiendra activement les efforts et initiatives de sensibilisation à la paix.
L’année dernière, environ 1,98 million de personnes ont visité le Musée du Mémorial de la Paix d’Hiroshima. Ce nombre record témoigne d’un intérêt sans précédent pour la ville bombardée par la bombe atomique et d’une augmentation d’une conscience de paix. Mon espoir est que tous les dirigeants mondiaux visiteront Hiroshima, vivront la volonté de l’humanité, comprendront les enjeux du bombardement atomique et garderont dans leur cœur le vœu des hibakusha : « Personne ne devrait jamais souffrir comme nous avons souffert. » Ensuite, tout en étant ici, j’espère qu’ils lanceront, avec détermination un appel fort à l’abolition des armes nucléaires.
Pour la deuxième fois consécutive, la Conférence d’examen du Traité sur la Non-Prolifération des Armes Nucléaires (TNP) a échoué à adopter un document final. Ces échecs ont révélé une dure réalité : les différences énormes entre les pays en ce qui concerne les armes nucléaires. J’espère que le gouvernement japonais, qui a répété que le TNP est la pierre angulaire du régime international de désarmement nucléaire et de non-prolifération, exercera un fort leadership, appelant tous les pays à dépasser leurs positions et à s’engager dans un dialogue constructif vers une relation de confiance. De plus, je demande que le Japon participe en tant qu’observateur à la Troisième Réunion des États Parties au Traité sur l’Interdiction des Armes Nucléaires qui se tiendra en mars de l’année prochaine. Par la suite, et dès que possible, le Japon doit devenir partie au traité. En outre, j’exige que le gouvernement japonais renforce les mesures de soutien aux hibakusha, y compris ceux vivant à l’étranger. A présent que leur âge moyen a dépassé 85 ans, le gouvernement doit reconnaître qu’ils continuent àsouffrir des nombreux effets émotionnels et physiques de la radiation.
Aujourd’hui, lors de cette Cérémonie du Mémorial de la Paix marquant les 79 ans depuis le bombardement, nous exprimons nos plus sincères condoléances aux âmes des victimes de la bombe atomique. Avec Nagasaki et des personnes partageant les mêmes idées de par le monde, en nous souvenant une fois de plus de la lutte des hibakusha, nous nous engageons à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour abolir les armes nucléaires et éclairer le chemin vers une paix mondiale durable. Citoyens du monde, marchons tous, avec espoir dans nos cœurs, aux côtés d’Hiroshima vers la paix de demain.
6 Août 2024
Kazumi MATSUI
Maire de la Ville d’Hiroshima