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Les syndicalistes autochtones réclament plus d’inclusion et de solidarité : « Nous ne sommes pas là juste pour entonner des chants et réciter des prières »

DROITS DE L’HOMME .

Un article de Equal Times (publié sous Creative Commons Attribution-NonCommercial 4.0 International licence)

À travers le monde, plus de 476 millions de personnes (soit 6,2 % de l’humanité) appartiennent à des peuples autochtones, coexistant presque toujours avec les sociétés qui ont colonisé leurs terres ancestrales il y a des centaines d’années. Au XXIe siècle, au terme d’un long parcours au cours duquel leur identité, leur langue ou une partie de leur culture n’ont pas toujours survécu à l’oppression coloniale, les peuples autochtones ont connu des avancées significatives dans différentes régions du monde. Toutefois, les défis qu’ils doivent relever, tels que la discrimination et le manque d’opportunités, ne leur permettent pas de s’intégrer équitablement au marché du travail. Quatre travailleurs autochtones sur cinq gagnent leur vie dans des emplois informels, tandis que les autres travaillent dans des secteurs extrêmement précaires, souvent exposés à toutes sortes d’abus et ne bénéficiant d’aucune protection sociale.

À l’occasion de la Journée internationale des peuples autochtones, instaurée par les Nations unies en 1982, et de l’appel lancé par la CSI  aux gouvernements du monde entier à signer la Convention relative aux peuples indigènes et tribaux  (C169) de l’Organisation internationale du travail (OIT) (qui, bien que lancée en 1989, n’a été ratifiée que par 24 pays), Equal Times s’est entretenu avec trois dirigeants syndicaux d’origine autochtone, issus de trois continents afin de dresser un tableau plus précis de la situation.


 Des dirigeants syndicaux maori, sami et mapuche s’entretiennent avec Equal Times. De gauche à droite : Laures Park (Nouvelle-Zélande), David Acuña (Chili) et Sissel Skoghaug (Norvège). (Equal Times/Composition by Fátima Donaire)

David Acuña Millahueique, président de la Central Unitaria de Trabajadores de Chile (CUT Chile), la principale organisation syndicale de son pays, nous parle depuis les Amériques. M. Acuña, qui devenait il y a un an le premier dirigeant d’origine mapuche à prendre la direction de cette organisation multisyndicale, participe actuellement au processus historique de création d’une nouvelle constitution pour le Chili. Dans ce cadre, la CUT s’efforce de cimenter la liberté d’association et le travail décent en tant que droits fondamentaux garantis dans un pays dont la constitution actuelle, en vigueur depuis la dictature militaire (1973-1990), ne contient pas encore de dispositions relatives aux droits du travail.

En Europe, c’est Sissel Skoghaug, vice-présidente de la Confédération syndicale norvégienne (LO) depuis dix ans et représentante du peuple sami  (également connu sous le nom de Lapons), l’ancien groupe ethnique nomade de l’Arctique, seul peuple autochtone encore présent sur le continent, qui s’entretient avec Equal Times.

En Océanie, nous avons parlé avec Laures Park, qui occupe la fonction de Matua Takawaenga (« médiateur en chef » en maori) du syndicat néo-zélandais des enseignants (NZEI Te Riu Roa), où elle intervient non seulement en tant qu’agent de liaison principal pour tout ce qui concerne les peuples indigènes de l’île, mais aussi, dans la pratique, en tant que dirigeante adjointe du syndicat en l’absence de la secrétaire nationale, ce qui constitue également tout un accomplissement symbolique pour les Maoris.

Dans votre pays, quelle est la situation actuelle des peuples autochtones en termes d’intégration ou de discrimination sur le plan social et professionnel ?

Laures Park (L.P.) : En Nouvelle-Zélande, la discrimination est toujours présente. Les problèmes sont nombreux, mais on observe aussi une forte intégration. Tout dépend des conditions socio-économiques et géographiques. Les Maoris, qui représentent environ 12 % de la population nationale, ont tendance à occuper les emplois peu rémunérés à forte intensité de main-d’œuvre. Ils occupent généralement des postes de préposés au nettoyage, d’éboueurs et de jardiniers paysagistes… ces types d’emplois. Certes, il y a aussi beaucoup de Maoris qui s’installent en ville et trouvent un emploi dans la fonction publique, mais il faut déménager pour trouver ce genre de postes. Du point de vue de la pauvreté, le taux est probablement très élevé pour les autochtones en Nouvelle-Zélande, en raison du manque d’accès à l’éducation dans leur région d’origine ainsi que du manque d’emploi.

Sissel Skoghaug (S.S.) : Le peuple sami a subi tellement d’injustices. Les autorités ont pratiquement réussi à dépouiller tout un peuple de son identité et de sa langue. Comme l’a récemment conclu la Commission Vérité et Réconciliation, ceci est également vrai pour le peuple Kvène et les Skogfinns (« Finlandais de la forêt »). [Cependant], en Norvège et dans certaines parties de la Suède, la culture samie a connu une très forte renaissance au cours des quatre dernières décennies. Les jeunes et un certain nombre de personnes de ma génération se réapproprient l’héritage perdu depuis deux ou trois générations.

David Acuña Millahueique (D.A.M.) : La situation professionnelle des personnes d’origine autochtone découle de l’intégration forcée de la société autochtone dans la société dominante des colonisateurs. Avant d’en arriver à la situation actuelle, il y a même eu des étapes d’esclavage, qui ont consisté à travailler d’abord dans des activités à revenus très faibles, en tant que travailleurs journaliers, apprentis charpentiers, maçons, boulangers, etc. Nombre de ceux qui ont migré de la campagne vers la ville exerçaient ces types de métiers, tandis que la majorité des femmes autochtones étaient employées de maison et chargées de soins. À l’heure actuelle, un pourcentage significatif des nouvelles générations a accédé à l’éducation formelle, de sorte que nous passons de travailleurs qui, par le passé, ne savaient ni lire ni écrire à ceux qui sont désormais alphabétisés, permettant ainsi des degrés de mobilité sociale minimes dans certains cas.

Qu’en est-il de la reconnaissance et du respect des cultures, des langues et des droits des peuples autochtones, et de leur intégration dans le monde du travail ?

S.S. : En Norvège, aujourd’hui, nous disposons d’un Parlement sami (Samediggi), créé en 1989. Il s’agit de l’organe représentatif du peuple sami dans le pays, qui encourage les initiatives politiques et est compétent pour un certain nombre de questions. Parallèlement, la principale langue samie est également une langue officielle en Norvège. De nombreux progrès ont été accomplis depuis que l’assimilation et la discrimination étaient encore officiellement à l’ordre du jour.

L.P. : En Nouvelle-Zélande, la situation oscille d’un extrême à l’autre. Tout un pan de la population ignore tout de la question ou n’en a cure, parce que les Maoris n’ont aucune incidence sur leur vie. Mais il y a aussi une autre partie de la population qui apprend la langue et participe aux coutumes, et qui est très impliquée dans tout ce qui se passe dans le système éducatif [où il existe un certain nombre d’écoles sélectionnées où la langue maorie est enseignée à tout le monde dès la petite enfance].

Une génération entière de Maoris parle uniquement le maori, et leur famille ne parle que le maori lorsqu’ils sortent et vivent leur vie, ce qui peut causer quelques tensions avec d’autres personnes, principalement des « blancs ». Mais à l’inverse, lorsque nous sommes au centre-ville, d’autres sont ravis d’entendre parler le maori dans la communauté. La situation varie donc. Il y a des gens qui voient cela comme : « Oh, mon Dieu, vous essayez de dissimuler quelque chose », et d’autres qui pensent que c’est tout simplement charmant de l’entendre. Nous avons une chaîne de télévision maorie et le nombre de non-Maoris qui la regarde est tout simplement incroyable. Donc, comme je l’ai dit, [la situation] varie.

D.A.M. : Au Chili, le processus d’intégration des autochtones a été fortement marqué par la discrimination sociale, mais aussi, souvent, par la discrimination au travail et la discrimination raciste, qui ont entraîné des pertes culturelles irréparables, comme la pratique de notre propre langue maternelle, en particulier pour la troisième génération [de Mapuches qui se sont installés dans les villes au milieu du XXe siècle]. Nous sommes devenus des migrants dans notre propre pays, parce que nous avons dû aller dans les villes plus développées, et avec ces processus de migration et d’intégration, nous avons tout perdu, depuis notre langue jusqu’à nos propres coutumes.

Les premières générations de migrants autochtones ont dû se conformer à un nouveau mode de vie et, bien entendu, se comporter « à la chilienne ». En fin de compte, on a fini par être « à moitié “chiliennisés” », en essayant souvent de cacher ou de déguiser ses origines mapuches, et cela s’est enraciné, au point d’éviter même d’utiliser notre propre langue et nos propres coutumes, tout cela pour tenter d’adopter les caractéristiques d’une société qui n’était pas la nôtre, afin de s’y adapter. Ce n’est qu’à partir de la quatrième génération, à laquelle j’appartiens, qu’un processus graduel d’auto-identification avec nos origines a commencé à se mettre en place. De fait, au cours des cinq ou six dernières années, le drapeau mapuche lui-même a fait l’objet d’une revendication, qui s’est manifestée en 2019 lors de l’explosion sociale, au cours de laquelle l’un des symboles les plus populaires et les plus visibles des manifestations a été ce drapeau mapuche. Il a presque causé un boom commercial, car le drapeau mapuche se vendait soudainement comme des petits pains. Cela montrait qu’une identité que nous avions perdue jusque-là était enfin remise à l’honneur.

(Cliquez ici pour une version espagnole de cet article, ou ici pour une version anglaise.)

Question(s) related to this article:
The right to form and join trade unions, Is it being respected?

Indigenous peoples, Are they the true guardians of nature?

Votre pays a-t-il ratifié la Convention de l’OIT relative aux peuples indigènes et tribaux (C169) de 1989 ? Comment a-t-elle affecté la vie des peuples autochtones actuels dans votre pays ? Quelle importance revêt la convention C169 pour votre peuple ?

S.S. : En 1990, la Norvège a été le premier pays à ratifier la convention 169 de l’OIT. Je suis fière du rôle joué par la confédération syndicale norvégienne dans la mise en œuvre de la Convention 169 de l’OIT, adoptée d’abord dans notre propre pays. Outre la Constitution et la loi sur les Samis, la Convention 169 de l’OIT est l’un des piliers de la politique norvégienne à l’égard des Samis. La Convention 169 de l’OIT est un monument à l’esprit collectif de coopération qui caractérisait la Norvège au début des années 1990. Cet esprit collectif a également permis à la population majoritaire de traverser une période difficile de chômage et de troubles financiers et politiques.

L.P. : En Nouvelle-Zélande, le gouvernement ne l’a pas ratifié. Sa justification est que nos nouvelles lois doivent se conformer à un grand nombre d’autres lois antérieures avant de pouvoir la ratifier. Pour nous, cela ne change rien. Si nous voulons faire valoir un point de vue, nous continuerons d’utiliser la C169, qui a toujours du poids. D’une certaine manière, [le fait que la Nouvelle-Zélande n’ait pas ratifié la convention C169] renforce probablement notre argument.

D.A.M. : Pour sa part, le Chili l’a ratifiée en 2008. L’État chilien a ainsi adopté une politique publique de reconnaissance des peuples autochtones et s’est engagé à mettre en place des politiques de reconnaissance et de respect à l’égard de cette composante de la société. Lorsque des politiques nationales susceptibles d’affecter les conditions sociales, culturelles, politiques et environnementales dans lesquelles évoluent les communautés autochtones sont élaborées, une consultation est toujours organisée. À ce jour, nous en sommes restés là, mais il s’agit d’une avancée importante, car cet outil permet aux communautés autochtones de s’exprimer sur les questions qui auront un impact direct sur elles, ce qui n’était pas le cas auparavant.

Pourquoi avez-vous adhéré à un syndicat, quelles difficultés avez-vous rencontrées dans votre environnement de travail et dans les syndicats eux-mêmes, simplement en raison de votre appartenance à une communauté autochtone ?

L.P. : J’y ai adhéré lorsque j’étais enseignante. Il y a de nombreuses années, nous avons discuté de la manière d’encourager les Maoris à s’intéresser aux syndicats. C’est à ce moment-là que le mouvement est devenu beaucoup plus pertinent pour moi. Et depuis lors, c’est ce qui m’a poussé à faire en sorte que les syndicats travaillent pour les Maoris.

Nous avons un dicton, donné par un très ancien tipuna [ancêtre], qui dit qu’« il n’y a qu’un seul chas d’aiguille par lequel tous les fils doivent passer : le blanc, le rouge, le noir. » Pour notre syndicat, ce sentiment est exactement celui auquel nous croyons que les gens devraient adhérer, car ce n’est qu’en s’unissant et en allant dans la même direction que l’on peut faire avancer les choses. Sinon, nous tirons les uns contre les autres.

D.A.M. : Je travaille depuis que j’ai 17 ans ; j’ai dû subvenir aux besoins de ma famille dès mon plus jeune âge et j’ai toujours été étroitement lié au travail. Lorsque j’ai commencé à découvrir le monde syndical, un jour, un syndicat est venu chercher des délégués au supermarché où je travaillais et deux camarades se sont présentés comme délégués. On pouvait en élire trois, et ces personnes-là n’avaient aucune conscience de classe ; on pourrait dire qu’elles n’étaient pas vraiment pro-travailleurs, elles étaient plutôt pro-patronat et elles étaient très proches de l’entreprise. J’ai donc dit : « Non, si nous voulons lutter pour les droits des travailleurs, nous devons conclure des accords avec l’entreprise, mais aussi avoir des désaccords et lutter pour les droits auxquels nous croyons ». Ça a été un moment, une décision, pour dire : « soit je continue à regarder le statu quo en spectateur, soit je provoque un certain changement », et j’ai choisi de provoquer un changement, avec les sacrifices que cela implique aussi.

Vu la position de leader que vous avez atteinte au sein de votre organisation, qu’est-ce que cela symbolise pour vous et pour la suite de la lutte pour les droits des autochtones ?

D.A.M. : C’est une source de fierté pour moi et ma famille. Ma première Fête du 1er mai en tant que président a été une date marquante pour moi. Ce jour-là, j’ai reconnu mon identité et j’ai affirmé : « Je suis un travailleur du commerce, je suis Mapuche et je viens d’une communauté autochtone de Lleulleu, dans la région de Los Ríos ». Plus qu’un dirigeant syndical, je me considère comme un travailleur et je reconnais également aujourd’hui mon héritage historique : ma mère a émigré du sud du Chili vers la capitale et nous avons perdu notre langue, nous avons perdu une partie de notre culture, mais nous n’avons pas perdu le lien avec le territoire. Il est très important pour moi de le reconnaître, car je suis fière de représenter aujourd’hui, à ce poste, un peuple aussi combatif que l’était et l’est encore le peuple mapuche dans sa revendication territoriale – qui est toujours latente à ce jour.

S.S : Avec le temps, j’ai découvert que ma propre famille avait perdu la majeure partie de son identité samie et kvène, y compris la langue, et ce en raison de la politique de « norvégiannisation » menée depuis des décennies. Mais nous nous réapproprions notre héritage, ma fille et mon fils ouvrant la voie avec des études de langues et bien d’autres choses encore. Lors de mes apparitions publiques, je suis très fière de porter le gakti (robe traditionnelle samie), que j’ai récemment fait confectionner. J’ai le sentiment que ce processus est en soi une victoire sur l’injustice qui a été commise.

Comment les syndicats peuvent-ils davantage aider les peuples autochtones à s’intégrer réellement dans le monde du travail ?

D.A.M. : Avec solidarité et respect. Le respect de l’identité, des croyances, mais aussi la solidarité et l’inclusion dans les espaces de travail.

S.S. : Nous étudierons ce que nous, la confédération syndicale norvégienne, pouvons faire pour contribuer à la lutte contre le racisme, comme nous l’avons fait sur le lieu de travail. Jusqu’à présent, dans le monde du travail, LO a été un ardent défenseur de la législation contre la discrimination désormais en vigueur en Norvège. Cette législation permet aujourd’hui aux employés et aux candidats à l’emploi de bénéficier de l’égalité des chances, indépendamment de leur appartenance ethnique, de leur religion, de leur sexe ou de leurs responsabilités en tant que soignant. Tous les employeurs norvégiens sont tenus de promouvoir activement, de manière ciblée et systématique, l’égalité et de prévenir la discrimination sur le lieu de travail, conformément à la loi sur l’égalité et la lutte contre la discrimination. Cette obligation de participation active de l’employeur est un travail préventif que les employeurs sont tenus d’effectuer avant que ne surviennent des incidents liés à la discrimination.

L.P. : Les syndicats pourraient se transformer en interne et employer davantage d’autochtones dans leurs organisations. En outre, ils ne devraient pas avoir peur de promouvoir ces choses auprès de leurs affiliés ; pour l’instant, c’est un peu perçu comme de la poudre aux yeux. Mais nous appartenons tous à ce pays. Nous devrions donc tous faire la même chose, sans nous contenter de laisser les gens être inclusifs ou de leur dire, et je vais être impoli : « Allez là-bas et jouez avec vos billes pendant que nous nous occupons du vrai travail à faire ici ». Les syndicats doivent être plus inclusifs et faire davantage la promotion des peuples autochtones, de sorte que nous ne soyons pas là juste pour entonner des chants et réciter les prières inaugurales.

Comment les peuples autochtones peuvent-ils contribuer, avec leurs sensibilités, leur culture et leurs expériences spécifiques, aux débats mondiaux actuels concernant la transition juste, la justice sociale, les droits humains et du travail et la santé démocratique de nos sociétés ?

D.A.M. : Au Chili, les peuples originels partent d’une culture de revendication qui réclame de nombreux droits qui leur ont été usurpés : le droit à la terre constitue l’une de leurs principales revendications, mais il y a aussi les cultures ancestrales, en particulier la médecine ancestrale, qui aujourd’hui fait déjà partie de la pénétration de la culture mapuche dans la société d’une manière qui était impensable auparavant. En effet, depuis 15 ou 20 ans, une rupture culturelle a permis à la culture des peuples originels de refaire surface. Aujourd’hui, la quasi-totalité des communes dispose d’une ruca mapuche, c’est-à-dire d’un centre cérémoniel consacré à la gastronomie, à la culture et à la médecine traditionnelle, de sorte qu’au-delà d’un drapeau et d’une tradition combative, apparaît également une culture ancestrale qui parle de solidarité, d’inclusion et de participation, de respect des aînés et de son propre corps.

S.S. : Je pense que nous devons revenir à l’esprit de coopération qui caractérisait la Norvège au début des années 1990. Nous vivons à nouveau une période de crise et de grands risques pèsent sur nous. La polarisation que nous observons à la fois à travers le monde et dans notre partie de celui-ci laisse la place à des forces qui ne souhaitent le bien ni des minorités, ni des majorités, ni des démocraties. Les droits acquis ne le seront pas automatiquement pour toujours. Le combat n’est jamais terminé. Le mouvement syndical en est bien conscient.

L.P. : Lorsque je pense à la transition juste, et en particulier au changement climatique, je pense que les peuples autochtones ont beaucoup à offrir. Mais les pouvoirs en place ne leur demandent rien. Par exemple, lorsque vous pensez aux régions qui souffrent actuellement de la sécheresse, du manque d’eau, etc., les peuples autochtones d’Australie vivent dans ces conditions depuis des années. Comment se fait-il qu’on ne leur parle pas ? Vous savez, sur la façon de survivre dans ce genre de situation ? Et quelle est votre contribution à ces conversations ? Les peuples autochtones ont toujours su agir avec sagesse et de manière durable, et ils continueront à le faire. Les peuples autochtones détiennent une grande partie de ce savoir et s’en servent probablement comme s’il s’agissait du simple bon sens de la vie quotidienne. Si quelqu’un se donnait la peine d’enquêter ou d’en parler, je pense que les peuples autochtones ont beaucoup à offrir, mais premièrement : ont-ils voix au chapitre ? Et deuxièmement, les gens écoutent-ils ce qu’ils ont à dire ?

 

Nations Unies: Resolution sur la Culture de la Paix

DESARMAMENT & SECURITE .

Info de document A/77/L.74 and Meeting coverage of 79th Meeting of GA 77th Session

L’Assemblée générale des Nations Unies a adopté sans vote la résolution de cette année pour la culture de la paix, présentée comme d’habitude par la délégation du Bangladesh.

La résolution a été parrainée par les pays suivants : Allemagne, Angola, Argentine, Arménie, Autriche, Azerbaïdjan, Bahreïn, Bangladesh, Bélarus, Bosnie-Herzégovine, Brunéi Darussalam, Cambodge, Canada, Chine, Espagne, Fédération de Russie, Gambie, Guinée équatoriale, Honduras, Hongrie, Inde, Jordanie, Kazakhstan, Kiribati, Maroc, Mauritanie, Népal, Nicaragua, Pakistan, Qatar, République dominicaine, République-Unie de Tanzanie, Singapour, Slovénie, Sri Lanka, Thaïlande, Tunisie, Turkménistan, Vanuatu et Venezuela.


Photo de BNN

Après 40 alinéas du préambule qui, entre autres, reconnaissaient << l'importance de la Déclaration et du Programme d'action en faveur d'une culture de la paix, adoptés par l'Assemblée générale le 13 septembre 1999 >>, la résolution comprenait les 21 paragraphes suivants :

,1. Réaffirme que la mise en œuvre effective du Programme d’action en faveur d’une culture de paix vise à renforcer le mouvement mondial voué à cette mission et demande à tous les intéressés de porter une attention renouvelée à cet objectif ;

2. Invite les États Membres à continuer de privilégier et de multiplier les activités visant à promouvoir une culture de paix aux échelons national, régional et international, et à veiller à ce que la paix et la non-violence soient encouragées à tous les niveaux ;

3. Invite les entités du système des Nations Unies à prendre en compte, dans le cadre de leur mandat, selon qu’il conviendra, les huit domaines d’intervention du Programme d’action dans leurs programmes d’activité, en s’attachant à promouvoir une culture de paix et de non-violence aux niveaux national, régional et international ;

4. Félicite l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture d’avoir renforcé l’action qu’elle mène pour mobiliser l’ensemble des parties prenantes en faveur d’une culture de paix, qu’elles appartiennent ou non au système des Nations Unies, et l’invite à poursuivre son travail de communication et d’information, y compris grâce au site Web sur la culture de la paix ;

5. Se félicite des initiatives et des mesures concrètes prises par les entités compétentes des Nations Unies, dont le Fonds des Nations Unies pour l’enfance, l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes) et l’Université pour la paix, ainsi que des activités qu’elles mènent pour promouvoir plus avant la culture de paix et de non-violence, en particulier l’éducation pour la paix, et des initiatives qui intéressent tel ou tel volet du Programme d’action, et les encourage à poursuivre et à intensifier leurs efforts ;

6. Souligne qu’il importe de s’attaquer aux facteurs sous-jacents de la violence et des conflits afin de promouvoir une culture de paix ;

7. Encourage les États Membres, les entités des Nations Unies et les autres acteurs concernés à adopter une approche globale des dimensions transversales de la paix, du développement, de l’action humanitaire et des droits humains afin d’empêcher la reprise des conflits et de construire une paix durable ;

8. Souligne que le développement du jeune enfant contribue à la création de sociétés plus pacifiques par la promotion de l’égalité, de la tolérance, du développement humain et du respect des droits humains, et souhaite que des moyens soient mobilisés en faveur de l’éducation préscolaire et, notamment, que des politiques et des pratiques efficaces soient adoptées en ce sens, afin de promouvoir la culture de paix ;

9. Encourage les États Membres, les entités des Nations Unies, les organisations régionales et sous-régionales et les acteurs intéressés à envisager de créer des dispositifs permettant d’amener les jeunes à devenir des artisans d’une culture de paix, de tolérance et de dialogue interculturel et interreligieux et à faire comprendre, selon qu’il convient, les notions de respect de la dignité humaine, de pluralisme et de diversité, y compris éventuellement au moyen de programmes éducatifs visant à dissuader les jeunes de participer à des actes de terrorisme et à les éloigner de l’extrémisme violent pouvant conduire au terrorisme, de la violence, de la xénophobie et de toutes les formes de discrimination ;

(Voir suite sur colonne de droite. . . )

(Cliquez ici pour une version anglaise de cet article ou ici pour une version espagnole.)

Question for this article:

What is the United Nations doing for a culture of peace?

(. . . suite)

10. Encourage l’Alliance des civilisations de l’Organisation des Nations Unies à multiplier les activités mettant l’accent sur l’éducation pour la paix et l’éducation à la citoyenneté mondiale afin que les jeunes comprennent mieux les valeurs que sont la paix, la tolérance, la bienveillance, l’ouverture aux autres et le respect mutuel, qui sont essentielles à la promotion de la culture de paix ;

11. Encourage le dispositif de consolidation de la paix des Nations Unies à continuer de promouvoir les activités de consolidation et de pérennisation de la paix, conformément aux dispositions de ses résolutions 72/276 et 75/201, et à faire progresser la culture de paix et de non-violence dans toute entreprise de consolidation de la paix menée au lendemain d’un conflit à l’échelon national, et mesure l’importance du rôle joué par la Commission de consolidation de la paix à cet égard ;

12. Souligne qu’il est crucial de parvenir à un relèvement inclusif, résilient et durable après la pandémie de COVID-19, et, dans cette perspective, invite les États à promouvoir les valeurs liées à la culture de la paix en vue de combattre, entre autres, la montée des inégalités, de la discrimination, de l’exclusion, des crimes de haine et de la violence ;

13. Exhorte les autorités compétentes à dispenser aux enfants, dans les écoles, une éducation adaptée à chaque âge qui favorise une culture de paix et de non-violence en accordant notamment une place à la compréhension de l’autre, au respect, à la tolérance, à la citoyenneté mondiale active et aux droits humains ;

14. Encourage les médias, en particulier les médias grand public, à participer à la promotion d’une culture de paix et de non-violence, surtout auprès des enfants et des jeunes ;

15. Rend hommage à la société civile, aux organisations non gouvernementales et aux jeunes pour ce qu’ils font pour promouvoir plus avant la culture de paix et de non-violence, notamment dans le cadre de leur campagne de sensibilisation à la culture de paix et au règlement pacifique des différends ;

16. Encourage la société civile et les organisations non gouvernementales à redoubler encore d’efforts pour promouvoir la culture de paix, notamment en adoptant leurs propres programmes d’activité pour compléter les initiatives des États Membres, des organismes des Nations Unies et des autres organisations internationales et régionales, dans l’esprit de la Déclaration et du Programme d’action ;

17. Invite les États Membres, toutes les entités du système des Nations Unies et les organisations de la société civile à prêter une attention croissante à la célébration chaque année, le 21 septembre, de la Journée internationale de la paix qui, comme elle l’a décidé dans sa résolution 55/282 du 7 septembre 2001, doit être une journée mondiale de cessez-le-feu et de non-violence, ainsi qu’à celle de la Journée internationale de la non-violence, le 2 octobre, comme elle l’a décidé dans sa résolution 61/271 du 15 juin 2007 ;

18. Prie sa présidence d’envisager d’organiser un forum de haut niveau, selon qu’il conviendra et dans la limite des ressources disponibles, sur la mise en œuvre du Programme d’action, lequel se tiendrait à l’occasion de l’anniversaire de son adoption, le ou vers le 13 septembre, et demande au Secrétariat de soutenir, sur le plan logistique, l’organisation effective de ce forum de haut niveau, dans la limite des mandats respectifs et des ressources disponibles ;

19. Invite le Secrétaire général, agissant dans la limite des ressources disponibles et en consultation avec les États Membres et en tenant compte des observations communiquées par les organisations de la société civile intéressées, à réfléchir aux mécanismes et stratégies qu’il conviendrait d’adopter, en particulier dans le domaine de l’informatique et des communications, pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action et à lancer une campagne de communication, grâce à des activités d’information menées par le Département de la communication globale du Secrétariat, pour faire mieux connaître le Programme d’action et ses huit domaines d’intervention, aux fins de leur mise en œuvre ;

20. Prie le Secrétaire général de lui présenter à sa soixante-dix-neuvième session un rapport établi dans la limite des ressources disponibles sur les mesures prises par les États Membres, en se fondant sur les renseignements qu’ils auront fournis, et sur les mesures prises à l’échelle du système par toutes les entités concernées des Nations Unies aux fins de l’application de la présente résolution ;

21. Décide d’inscrire à l’ordre du jour provisoire de sa soixante-dix-huitième session la question intitulée « Culture de paix ».

Après la présentation du Bangladesh, la résolution a été accueillie favorablement par le Brunéi Darussalam, s’exprimant au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE), par le Venezuela, s’exprimant au nom du Groupe des amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, par la Barbade, s’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM). D’autres orateurs venaient de Syrie, de Malaisie, du Maroc, des Émirats arabes unis, de Guinée équatoriale et d’Iran, et un échange de critiques entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.

Maires pour la Culture de la Paix

. PARTICIPATION DÉMOCRATIQUE . .

Extraits de la newsletter internationale MAYORS FOR PEACE Avril 2023 (traduction par l’Association Française des Communes, Départements et Régions pour la Paix)

Rejoignez-nous pour promouvoir la Culture de la Paix

Maires pour la Paix met en avant trois objectifs dans sa Vision pour une transformation pacifique vers un monde durable (Vision PX) : La construction de la paix par les villes pour le désarmement et la sécurité commune. L’un d’entre eux est de promouvoir la Culture de la Paix, ce que la Vision PX explique comme suit :

[Nous cultiverons une conscience de la paix et ferons en sorte que la Culture de la Paix – culture dans laquelle les actions quotidiennes de chaque personne soient fondées sur une réflexion sur la paix – s’enracine dans la société en tant que fondement d’une paix mondiale durable.]


(Cliquez ici pour l’article en anglais. )

Latest Discussion

How can culture of peace be developed at the municipal level?

Ce numéro d’avril du Flash Info de Maires pour la Paix présente certaines des initiatives de Maires pour la Paix qui promeuvent la Culture de la Paix. Nous espérons que ces exemples inciteront votre collectivité à mettre en œuvre des initiatives de promotion de la Culture de la Paix.

Célébrez le mois de la Culture de la Paix

Nous encourageons les collectivités à célébrer un mois particulier de l’année comme le “Mois de la Culture de la Paix” en organisant différents événements culturels pour sensibiliser les citoyens à la paix. L’objectif est de permettre une réflexion sur l’importance de la paix par le biais de la musique, des arts plastiques et d’autres formes d’art exprimant le désir de paix, ainsi que par le biais du sport et d’autres activités qui permettent de créer du lien entre les personnes au-delà des barrières linguistiques et culturelles.

Depuis 2021, la ville d’Hiroshima a désigné le mois de novembre comme le “Mois de la culture de la paix”. Ce mois voit une variété d’événements sur le thème de la Culture de la Paix organisés en coopération avec des entreprises du secteur privé et des groupes de citoyens. Ces événements comprennent, par exemple, des conférences sur la Culture de la Paix, des représentations théâtrales et des expositions artistiques réalisées par des jeunes.

Voir “Mois de la culture de la paix 2022” par la ville d’Hiroshima (en japonais).

Organiser des événements pour commémorer la Journée internationale de la paix

Nous recommandons aux collectivités d’organiser des activités de sensibilisation et des événements commémoratifs à l’occasion de la Journée internationale de la paix des Nations unies, qui est célébrée le 21 septembre chaque année, afin que le plus grand nombre possible de citoyens partagent le souhait d’abolir les armes nucléaires.

Le Mouvement mondial de la poésie: pour la culture de la paix

EDUCATION POUR LA PAIX .

Un article de Ici Beyrouth

Le Mouvement mondial de la poésie (WPM), une organisation internationale qui rassemble des poètes et des promoteurs de poésie des cinq continents, exprime sa préoccupation et le rejet du conflit armé entre la Russie et l’Ukraine, dont les deux nations souveraines sont des protagonistes, et plaide pour une solution pacifique. L’histoire nous enseigne que la guerre n’est pas une solution aux conflits, mais un fléau qui affecte l’humanité dans son ensemble et il est de notre devoir d’avertir du danger réel d’une escalade nucléaire dont la possibilité constitue une menace imminente pour la vie sur la planète. En tant que poètes, nous adoptons le mot comme moyen de création sensible, mais aussi comme un outil politique et social pour la construction d’un monde plus juste, plus équitable et plus humain.


(Voir suite sur colonne de droite.)

(cliquez ici pour une traduction anglaise.

Question pour cet article:

How can poetry promote a culture of peace?

(. . suite)

Par conséquent, le WPM se félicite des initiatives de la Chine, du Brésil et d’autres pays qui se sont prononcés en faveur d’une solution négociée au conflit entre la Russie et l’Ukraine, et rejoint l’appel des mouvements sociaux au dialogue comme seule méthode de résolution de ce conflit et de tout autre conflit international. Il convient de noter que, du point de vue idéologique, le mouvement mondial de poésie (WPM) est un espace pluriel où convergent des poètes de différentes persuasion et positions.
Cette pluralité n’a pas été un obstacle pour s’unir pour défendre la diversité culturelle et politique à laquelle les peuples du monde ont droit. Nous savons par l’expérience que par la volonté, ce que nous avons en commun peut prévaloir sur de petites différences : l’amour de la vie. Pour paraphraser Saint-Augustin, face à la guerre, nous ne demandons à personne comment il pense, mais comment il aime.

C’est pourquoi nous ne pouvons pas et ne voulons pas être indifférents au conflit entre la Russie et l’Ukraine ou oublier qu’il existe actuellement de nombreuses autres guerres dans le monde qui sont ignorées par l’opinion publique internationale. La guerre au Yémen, le conflit palestinien israélien, la crise au Myanmar, la situation en Syrie, en Colombie, entre autres, sont des événements douloureux qui nécessitent une attention et des actions égales de l’humanité dans son ensemble pour parvenir à des solutions justes et pacifiques. Il est de notre devoir, en tant que poètes, d’être témoins et champions des valeurs humaines, mais aussi de mobiliser de la poésie et des citoyens pour la construction de solutions réelles.

Combiner des mots avec l’action est le seul moyen que nous connaissons pour parvenir à l’utopie d’un monde pour la paix, pour la justice et pour la vie, de partout et pour tout le monde.

La Situation des Droits Humains dans le Monde: Amnesty International – Rapport 2022/23

DROITS DE L’HOMME .

Un rapport de Amnesty International

* Le Rapport annuel d’Amnesty International pour 2022 met en évidence l’existence à travers le monde de deux poids deux mesures en matière de droits humains, ainsi que l’incapacité de la communauté internationale à s’unir autour d’une application systématique des valeurs universelles de protection des droits fondamentaux.

* La réaction ferme de l’Occident à l’agression menée par la Russie contre l’Ukraine contraste fortement avec le manque déplorable d’actions dignes de ce nom face aux graves violations commises par certains de ses alliés, comme l’Arabie saoudite, l’Égypte et Israël.

* Les droits des femmes et la liberté de manifester sont menacés par les États, qui manquent à leur obligation de protéger et de respecter les droits sur leur territoire.

* À l’approche des 75 ans de la Déclaration universelle des droits de l’homme, Amnesty International tient à rappeler qu’un système international fondé sur des règles doit s’appuyer sur les droits humains et s’appliquer à tous et à toutes, partout dans le monde.

L’invasion de grande ampleur de l’Ukraine par la Russie en 2022 a donné lieu à de nombreux crimes de guerre, déclenché une crise mondiale dans les secteurs de l’énergie et des denrées alimentaires, et cherché à perturber encore davantage un système multilatéral déjà faible. Elle a aussi dévoilé au grand jour l’hypocrisie des États occidentaux, qui ont réagi avec force à l’agression russe mais ont fermé les yeux sur de graves violations commises ailleurs, voire en ont été complices, a déclaré Amnesty International lors de la publication de son bilan annuel de la situation des droits humains à travers le monde.

Le Rapport 2022/23 d’Amnesty International sur la situation des droits humains dans le monde constate que la pratique de deux poids deux mesures et les réponses insuffisantes aux atteintes aux droits humains commises aux quatre coins de la planète ont alimenté l’impunité et l’instabilité. Citons par exemple le silence assourdissant sur le bilan de l’Arabie saoudite en matière de droits fondamentaux, la passivité à propos de l’Égypte et le refus d’affronter le système d’apartheid mis en place par Israël contre les Palestinien·ne·s.

Ce rapport dénonce aussi le recours par la Chine à la manière forte pour étouffer toute action internationale sur les crimes contre l’humanité qu’elle a commis, ainsi que l’incapacité des institutions mondiales et régionales (paralysées par la priorité donnée par leurs membres à leurs propres intérêts) à répondre de manière satisfaisante à des conflits qui font des milliers de morts, par exemple en Éthiopie, au Myanmar et au Yémen. « L’invasion de l’Ukraine par la Russie est un exemple glaçant de ce qui peut se produire quand des États pensent pouvoir faire fi du droit international et violer les droits humains en toute impunité », a déclaré Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International.

« La Déclaration universelle des droits de l’homme est née il y a 75 ans des cendres de la Seconde Guerre mondiale. Sa pierre angulaire est la reconnaissance universelle du fait que tout le monde a des droits et des libertés fondamentales. Les droits humains ne doivent pas se perdre dans le chaos de la dynamique mondiale du pouvoir. Ils doivent guider le monde alors qu’il évolue dans un environnement de plus en plus instable et dangereux. Nous ne devons pas attendre que le monde brûle une nouvelle fois. »

La pratique honteuse de deux poids, deux mesures ouvre la voie à de nouvelles atteintes aux droits humains

L’invasion de grande ampleur de l’Ukraine par la Russie a déclenché l’une des pires crises humanitaires et relatives aux droits humains de l’histoire européenne récente. Ce conflit a non seulement entraîné des déplacements massifs, des crimes de guerre et une insécurité énergétique et alimentaire, mais aussi réveillé le spectre effrayant de la guerre nucléaire.

La réaction a été rapide. L’Occident a imposé des sanctions économiques à Moscou et envoyé une aide militaire à Kiev, tandis que la Cour pénale internationale ouvrait une enquête sur les crimes de guerre en Ukraine et que l’Assemblée générale des Nations unies votait la condamnation de l’invasion russe, qualifiée d’acte d’agression. Cependant, cette réponse ferme et bienvenue a fortement contrasté avec les précédentes réactions aux violations massives commises par la Russie et d’autres pays, ainsi qu’avec l’insuffisance affligeante des réactions à d’autres conflits, comme en Éthiopie et au Myanmar.

« Si le système avait fonctionné et demandé des comptes à la Russie pour ses crimes avérés en Tchétchénie et en Syrie, des milliers de vies auraient pu être sauvées à l’époque et aujourd’hui, en Ukraine et ailleurs. Au lieu de cela, nous nous retrouvons avec encore plus de souffrance et de dévastation », a déclaré Agnès Callamard.

« Si, pour l’avenir, il est une leçon à tirer de la guerre d’agression menée par la Russie, c’est qu’il est fondamental de disposer d’un ordre international fondé sur des règles appliquées de manière effective et cohérente. Tous les États doivent accentuer leurs efforts pour aboutir à un tel ordre renouvelé qui bénéficie à tout le monde, partout sur la planète. »

Pour les Palestinien·ne·s de Cisjordanie occupée, l’année 2022 a été la plus meurtrière depuis que les Nations unies ont commencé à recenser systématiquement le nombre de victimes, en 2006. Au moins 151 personnes, dont plusieurs dizaines d’enfants, ont ainsi été tuées par les forces israéliennes. Les autorités israéliennes ont continué de chasser des Palestinien·ne·s de chez eux, et le gouvernement a lancé des projets d’extension drastique des colonies illégales dans toute la Cisjordanie occupée. Au lieu d’exiger la fin du système d’apartheid mis en place par Israël, nombre de gouvernements occidentaux ont préféré s’en prendre à celles et ceux qui le dénonçaient.

Les États-Unis ont critiqué haut et fort les violations commises par la Russie en Ukraine et ont accueilli des dizaines de milliers d’Ukrainiennes et Ukrainiens fuyant la guerre mais, en vertu de politiques et de pratiques ancrées dans un racisme à l’égard des personnes noires, ils ont expulsé plus de 25 000 Haïtiennes et Haïtiens entre septembre 2021 et mai 2022, et infligé à nombre de ces personnes des actes de torture et d’autres mauvais traitements.

Les pays de l’Union européenne ont ouvert leurs frontières aux Ukrainien·ne·s qui fuyaient l’agression russe, montrant que, en tant que bloc parmi les plus riches du monde, ils étaient plus que capable de recevoir un grand nombre de personnes en quête de sécurité et de leur donner accès à la santé, à l’éducation et au logement. En revanche, beaucoup ont laissé leurs portes fermées à celles et ceux qui cherchaient à échapper à la guerre et à la répression en Afghanistan, en Libye et en Syrie.

« Les réactions à l’invasion de l’Ukraine par la Russie nous montrent ce qui peut être fait dès lors que la volonté politique existe. Nous avons assisté à des condamnations mondiales, à des enquêtes sur les crimes commis, et à l’ouverture des frontières aux personnes réfugiées. C’est ainsi que nous devrions réagir à toutes les violations massives des droits humains », a déclaré Agnès Callamard.

Cette politique de deux poids, deux mesures de l’Occident a enhardi des pays comme la Chine, et a permis à l’Arabie saoudite et à l’Égypte d’échapper aux critiques sur leur bilan en matière de droits humains, ou de les ignorer et de s’en détourner.

Ainsi, malgré des violations généralisées, constituant des crimes contre l’humanité, perpétrées contre les Ouïghour·e·s et d’autres minorités musulmanes, la Chine a échappé à toute condamnation internationale de la part de l’Assemblée générale, du Conseil de sécurité et du Conseil des droits de l’homme de l’ONU.

Le Conseil des droits de l’homme a créé un mandat de rapporteur·euse spécial·e sur la situation des droits humains en Russie et un mécanisme d’enquête sur l’Iran à la suite de la répression meurtrière des manifestations dans ce pays, mais il a décidé par un vote de ne pas enquêter davantage ni même de débattre au sujet des éléments recueillis par les Nations unies elles-mêmes indiquant que des crimes contre l’humanité pouvaient avoir été commis dans le Xinjiang (Chine), et il a renoncé à une résolution sur les Philippines.

« Les pays ont appliqué le droit relatif aux droits humains au cas par cas, faisant preuve au fil du temps d’une hypocrisie flagrante et de deux poids, deux mesures. Les États ne peuvent pas un jour critiquer des violations et le lendemain tolérer des actes similaires dans d’autres pays uniquement parce que leurs intérêts sont en jeu. C’est un comportement inadmissible, qui affaiblit la trame même des droits fondamentaux universels », a déclaré Agnès Callamard.

« Il est aussi nécessaire que les pays qui n’ont pas encore fait entendre leur voix prennent position contre les atteintes aux droits humains quel que soit l’endroit où elles se produisent. Nous avons besoin de moins d’hypocrisie, de moins de cynisme et de plus d’action cohérente, fondée sur des principes et ambitieuse de la part de tous les États pour promouvoir et protéger l’ensemble des droits. »

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Question(s) related to this article:

What is the state of human rights in the world today?

Une répression brutale de la dissidence partout dans le monde

En 2022, en Russie, des dissident·e·s ont été traduits en justice et des médias fermés pour avoir simplement osé mentionner la guerre en Ukraine. Des journalistes ont été emprisonnés en Afghanistan, au Bélarus, en Éthiopie, au Myanmar, en Russie et dans des dizaines d’autres pays du monde frappés par des conflits.

En Australie, en Inde, en Indonésie et au Royaume-Uni, les autorités ont adopté de nouvelles lois imposant des restrictions sur les manifestations, tandis qu’au Sri Lanka elles ont utilisé des pouvoirs d’exception pour réprimer le mouvement de protestation massif contre la crise économique croissante. La législation du Royaume-Uni donne aux policiers des pouvoirs extrêmement larges, notamment la possibilité d’interdire les « manifestations bruyantes », ce qui porte atteinte aux droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique.

La technologie a été utilisée comme une arme contre de nombreuses personnes, pour les réduire au silence, empêcher des rassemblements publics ou faire de la désinformation.

Les autorités iraniennes ont répondu au soulèvement sans précédent contre des décennies d’oppression par une force illégale, tirant des balles réelles, des projectiles en métal et du gaz lacrymogène, et rouant de coups les protestataires. Plusieurs centaines de personnes, dont des dizaines d’enfants, ont été tuées. En décembre, les forces de sécurité péruviennes ont eu recours à une force illégale, en particulier contre des membres de peuples autochtones et des campesinos, en réaction aux manifestations pendant la crise politique qui a suivi la destitution du président Pedro Castillo. La répression a aussi touché des journalistes, des défenseur·e·s des droits humains et des opposant·e·s politiques, par exemple au Mozambique et au Zimbabwe..

En réaction aux menaces croissantes visant le droit de manifester, Amnesty International a lancé en 2022 une campagne mondiale destinée à contrer les efforts redoublés que déploient certains États pour saper le droit fondamental à la liberté de réunion pacifique. Dans le cadre de cette campagne, l’organisation demande l’adoption d’un traité contre le commerce des instruments de torture, qui interdirait la fabrication et le commerce des équipements de maintien de l’ordre intrinsèquement abusifs et contrôlerait le commerce de ceux qui sont souvent utilisés pour commettre des actes de torture et d’autres mauvais traitements.

Les femmes frappées de plein fouet en l’absence de protection et de respect de leurs droits par les États

La répression de la dissidence et l’incohérence des politiques en matière de droits humains ont aussi eu de lourdes répercussions sur les droits des femmes.

La Cour suprême des États-Unis a invalidé la garantie constitutionnelle qui protégeait depuis des années le droit à l’avortement, remettant ainsi en cause d’autres droits humains, tels que les droits à la vie, à la santé, au respect de la vie privé, à la sécurité et à la non-discrimination de millions de femmes, de filles et d’autres personnes pouvant être enceintes.

À la fin de 2022, plusieurs États des États-Unis avaient adopté des lois interdisant ou restreignant l’accès à l’avortement, tandis qu’en Pologne des militant·e·s étaient poursuivis en justice pour avoir aidé des femmes à se procurer des pilules abortives.

Aux États-Unis, les femmes autochtones continuaient d’être touchées de manière disproportionnée par les viols et les autres formes de violences sexuelles. Au Pakistan, plusieurs meurtres de femmes tuées par un membre de leur famille ont eu un grand retentissement. Malgré cela, le Parlement n’avait toujours pas adopté à la fin de l’année le projet de loi sur la violence domestique en instance depuis 2021. En Inde, des violences contre des femmes dalits (opprimées) et adivasis (aborigènes), ainsi que d’autres crimes motivés par la haine liée à la caste, ont été commis en toute impunité.

L’Afghanistan a été le théâtre d’une régression particulièrement forte des droits des femmes et des filles à l’autonomie personnelle, à l’éducation, au travail et à l’accès aux espaces publics, due à de nombreux décrets pris par les talibans. En Iran, la « police des mœurs » a violemment arrêté Mahsa (Zhina) Amini parce qu’elle avait laissé des mèches de cheveux dépasser de son foulard. Cette jeune fille est morte en détention quelques jours plus tard après avoir, selon des témoignages crédibles, été torturée, ce qui a déclenché des manifestations dans tout le pays, au cours desquelles de nombreuses autres femmes et filles ont été blessées, arrêtées ou tuées.

« La volonté des États de contrôler le corps, la sexualité et la vie des femmes et des filles est source de terribles violences, d’oppression et de pertes de potentiel », a déclaré Agnès Callamard.

Une action mondiale cruellement insuffisante face aux menaces pesant sur l’humanité

En 2022, le monde entier a continué de souffrir des conséquences de la pandémie de COVID-19. Le changement climatique, les conflits et les crises économiques provoquées en partie par l’invasion russe de l’Ukraine ont encore aggravé les menaces pesant sur les droits humains.

Du fait de la crise économique, 97 % de la population vivait dans la pauvreté en Afghanistan. En Haïti, plus de 40 % de la population se trouvait en situation d’insécurité alimentaire aiguë à cause de la crise politique et humanitaire, exacerbée par la violence généralisée des gangs.

Les phénomènes météorologiques extrêmes accentués par le réchauffement rapide de la planète ont provoqué la famine et la maladie dans plusieurs pays d’Asie du Sud et d’Afrique subsaharienne, tels que le Nigeria et le Pakistan, où les inondations ont eu des effets catastrophiques sur la vie et les moyens de subsistance de la population et ont provoqué des épidémies de maladies à transmission hydrique, qui ont fait des centaines de morts.

Dans ce contexte, les États n’ont pas agi dans l’intérêt supérieur de l’humanité et n’ont pas su réduire leur dépendance aux énergies fossiles, principal facteur qui nous pousse vers la plus grande menace à la vie que nous ayons jamais connue. Cet échec collectif est un autre exemple flagrant de la faiblesse des systèmes multilatéraux actuels.

« Le monde est assailli de crises qui se télescopent : multiplication des conflits armés, cruauté de l’économie mondiale, qui laisse trop d’États accablés par une dette insoutenable, abus en matière de fiscalité des entreprises, utilisation de la technologie comme une arme, crise climatique, évolution des rapports de pouvoir, etc. Nous n’avons aucune chance de survivre à ces crises sans institutions internationales aptes à s’acquitter de leurs fonctions », a déclaré Agnès Callamard.

Des institutions internationales défaillantes à remettre en état de marche

Il est indispensable que les institutions et les systèmes internationaux destinés à protéger nos droits soient renforcés plutôt qu’affaiblis. La première étape est de financer pleinement les mécanismes de défense des droits humains des Nations unies, afin que des enquêtes puissent être menées, que l’obligation de rendre des comptes soit garantie et que justice soit rendue.

Amnesty International demande aussi une réforme du principal organe de prise de décisions de l’ONU, le Conseil de sécurité, afin de faire entendre la voix des pays et des situations qui sont traditionnellement ignorés, en particulier dans l’hémisphère sud.

« Le système international a besoin d’être sérieusement réformé pour tenir compte des réalités actuelles. Nous ne pouvons pas laisser les membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies continuer de brandir leur pouvoir de veto et d’abuser de leurs privilèges sans contrôle. Le manque de transparence et d’efficacité du processus de prise de décisions du Conseil de sécurité expose la totalité du système à la manipulation, aux abus et aux dysfonctionnements », a déclaré Agnès Callamard.

Heureusement, tandis que les gouvernements obnubilés par leurs propres intérêts ne font rien pour mettre nos droits fondamentaux au premier plan, le mouvement de défense des droits humains montre qu’il reste possible de tirer de l’inspiration et de l’espoir des populations mêmes que les États devraient protéger.

En Colombie, l’action militante et judiciaire persistante en faveur des droits des femmes a joué un rôle dans la décision de la Cour constitutionnelle de dépénaliser l’avortement pendant les 24 premières semaines de la grossesse. Au Soudan du Sud, Magai Matiop Ngong, condamné à mort à l’âge de 15 ans en 2017, a été libéré de prison. Sa remise en liberté est intervenue après qu’une pétition réclamant sa libération a recueilli plusieurs milliers de signatures à travers le monde.

Au Guatemala, le militant écologiste autochtone maya Bernardo Caal Xol a bénéficié d’une libération conditionnelle après avoir passé quatre ans en détention sur la base d’accusations forgées de toutes pièces. En Espagne, après des années de campagne des mouvements de défense des femmes, le Parlement a adopté une loi plaçant le consentement au cœur de la définition juridique du viol. Le Kazakhstan et la Papouasie-Nouvelle-Guinée ont abrogé la peine de mort.

« Alors qu’il serait facile de céder au désespoir face aux atrocités et aux atteintes aux droits humains, des gens ont montré tout au long de l’année 2022 que nous ne sommes pas impuissant·e·s », a déclaré Agnès Callamard.

« Nous avons été témoins d’actes de défiance iconiques, comme les manifestations de femmes afghanes contestant le régime taliban et des femmes iraniennes marchant tête nue en public ou se coupant les cheveux pour protester contre les lois sur le port obligatoire du voile. Des millions de personnes soumises à l’oppression systématique du patriarcat ou du racisme sont descendues dans la rue pour réclamer un avenir meilleur. Elles l’avaient déjà fait les années précédentes et ont recommencé en 2022. Cela devrait rappeler aux détenteurs du pouvoir que nous ne serons jamais des spectateurs et spectatrices passifs de leurs attaques contre notre dignité, notre égalité et notre liberté. »

 

Pour une Culture de la Non-Violence – la Vidéo du Pape

TOLÉRANCE & SOLIDARITÉ .

Un article de Jesuits Global


La vidéo du Pape pour avril 2023

(Texte de la vidéo dans la colonne de droite)

(Cliquez ici pour une version espagnole de cet article, ou ici pour une version anglaise.)

Question for this article

Religion: a barrier or a way to peace?, What makes it one or the other?

(Texte de la vidéo)

Vivre, parler et agir sans violence, ce n’est pas baisser les bras, ni perdre, ni renoncer à quoi que ce soit. C’est aspirer à tout.

Comme le disait Saint Jean XXIII, il y a 60 ans, dans l’encyclique Pacem in Terris, la guerre est une folie, elle dépasse toute raison.

Toute guerre, tout affrontement armé, se termine toujours par une défaite pour tous.

Développons une culture de la paix.

Rappelons-nous que même en cas de légitime défense, la paix est le but à atteindre. Et qu’une paix durable ne peut être qu’une paix sans armes.

Faisons de la non-violence, tant dans la vie quotidienne que dans les relations internationales, un guide pour nos actions.

Et prions pour une plus ample diffusion d’une culture de la non-violence, qui signifie un recours moindre aux armes de la part des États comme des citoyens.

Amnesty International: En 2022, Ces Victoires qui Méritent d’être Célébrées

DROITS DE L’HOMME .

Un article de Amnesty International

Pour lutter contre les injustices, c’est ensemble que nous avons le plus de pouvoir. La preuve : ces victoires remportées en 2022. Face à la morosité ambiante et au flot de mauvaises nouvelles qui nous inonde, elles méritent d’être célébrées ! 

Tout au long de cette année, grâce à notre travail (campagnes, plaidoyer, sensibilisation, etc.) et à votre mobilisation, nous avons contribué à changer des vies, changer des lois. Partout dans le monde, nous avons aidé des personnes à obtenir justice et réussi à améliorer la situation de personnes dont les droits humains étaient bafoués.  

Tour d’horizon des victoires à célébrer, obtenues en 2022 en matière de droits humains. 

« We made it ! » : des personnes injustement détenues ont été libérées de prison 

En Afghanistan, le professeur Faizullah Jalal, maître de conférences à l’université, a été libéré en janvier après avoir été arrêté et détenu arbitrairement par les talibans. 

Ramy Shaath, le militant égypto-palestinien a vécu l’année 2022 en homme libre. Ce célèbre opposant politique et défenseur des droits humains en Égypte  a été arrêté arbitrairement et détenu dans son pays pendant deux ans et demi. Dès sa libération, en janvier 2022, il a remercié toutes les personnes qui se sont mobilisées pour lui : « Chacun de vos mots, chacune de vos lettres m’ont énormément apporté. Moralement mais aussi politiquement. Les autorités ne pouvaient pas ignorer que le monde les regardait. ». Le combat continue aujourd’hui pour tous les opposants injustement emprisonnés en Égypte. 
  
Au Soudan du Sud, Magai Matiop Ngong  a échappé à la peine de mort. Il avait été condamné à la peine capitale à l’âge de 15 ans, en 2017. Plus de 700 000 actions ont été menées dans le monde entier en sa faveur lors de notre grande campagne des « 10 jours pour signer » de 2019. Il a finalement été libéré en mars dernier. Un grand soulagement !

Au Guatemala, Bernardo Caal Xol, défenseur maya des droits des populations autochtones et de l’environnement, a été incarcéré pour des accusations forgées de toutes pièces en lien avec ses activités militantes. Plus d’un demi-million d’actions ont été menées en faveur de la libération de ce prisonnier d’opinion dans le cadre de notre campagne phare « 10 jours pour signer » de 2021. Une mobilisation payante : Bernardo a été libéré en mars dernier.

En Russie, l’artiste Ioulia Tsevtkova  risquait jusqu’à six ans de prison pour de simples dessins de corps de femmes et de vulves sur les réseaux sociaux. Grâce à une large mobilisation, l’artiste russe de 29 ans a finalement été acquittée en novembre dernier. Une décision d’autant plus réjouissante qu’elle est un exemple rare de justice dans la Russie  actuelle, qui a par ailleurs approuvé le 24 novembre dernier une loi durcissant l’interdiction de la « propagande » LGBTI.  

En Turquie, l’annulation de la condamnation de quatre défenseur·e·s des droits humains, en procès depuis 2017, a été un immense soulagement. Parmi eux, Taner Kılıç, président honoraire d’Amnesty Turquie, et Idil Eser, ex-directrice d’Amnesty Turquie. Tous deux membres fondateurs d’Amnesty International Turquie, ils jouent depuis vingt ans un rôle crucial dans la défense des droits humains dans leur pays. Cinq ans après leur emprisonnement, ce jugement met fin à une parodie de justice et révèle l’objectif à caractère politique de ces poursuites : se servir des tribunaux comme d’une arme pour faire taire les voix critiques. Cette bonne nouvelle ne nous fait pas oublier les nombreux défenseur·e·s des droits humains qui croupissent en prison, vivent dans la crainte d’être arrêtés ou font l’objet de poursuites infondées en Turquie. 

Des auteurs de violations des droits humains ont dû rendre des comptes 

En janvier, un tribunal allemand a condamné Anwar Raslan  ancien responsable des services de renseignement syriens, à la réclusion à perpétuité pour crimes contre l’humanité. Il a notamment été reconnu coupable de tortures, meurtres et viols de détenus dans la « Branche 251 », un centre de détention géré par le renseignement militaire à Damas. Un verdict historique et une victoire pour les familles des victimes de ce bourreau.  

En juin, un tribunal a enfin rendu une justice partielle pour le meurtre, en 2016, de Berta Cáceres, défenseure des droits de l’environnement et des populations autochtones : David Castillo a été condamné à une peine de prison en tant que co-auteur de son assassinat. Nous continuons à nous mobiliser pour que les autres responsables du meurtre de Berta Cáceres soient traduits en justice.

(Cliquez ici pour une version espagnole de cet article, ou ici pour une version anglaise.)

Question(s) related to this article:

What is the state of human rights in the world today?

En novembre, le Bureau fédéral d’enquête des États-Unis (FBI) a informé le gouvernement israélien qu’il mènerait une enquête sur l’homicide, en mai, de la journaliste palestino-américaine Shireen Abu Akleh par un soldat israélien.

La lutte pour l’abolition mondiale de la peine de mort a continué de progresser

Notre combat en faveur de l’abolition mondiale de la peine de mort  est historique. En 2022, il a connu de nouveaux succès, toute une série de pays ayant aboli ce châtiment ou pris des mesures significatives dans cette voie. 

L’abolition de la peine de mort pour tous les crimes est entrée en vigueur au Kazakhstan  en janvier.  

La Papouasie-Nouvelle-Guinée  lui a emboîté le pas en avril, abrogeant ce châtiment trente ans après sa réintroduction. Puis la République centrafricaine  en juin, la Guinée équatoriale  en septembre et la Zambie en décembre.

La tendance vers l’abolition universelle de la peine de mort  se confirme donc : 143 pays ont aboli la peine de mort en droit ou en pratique. Des pays restent encore à convaincre, le combat continue !

Des avancées importantes ont été remportées pour les droits des femmes et des personnes LGBTI

En 2022, nous avons contribué à certaines victoires notables pour les droits des femmes et des LGBTI

La marée verte se poursuit en Amérique latine. En Colombie, l’avortement a été dépénalisé jusqu’à la 24e semaine de grossesse. Cette nouvelle fait suite à la légalisation de l’avortement en Argentine, en 2020, et sa dépénalisation au Mexique, en 2021. 

En Espagne, un rapport sexuel sans consentement constitue désormais un viol. “No es no!” 

En Finlande, le Parlement a pris des mesures allant dans le même sens, avec des réformes qui font de l’absence de consentement un élément clé pour définir le viol. La Finlande a aussi adopté des réformes en octobre qui ont assoupli les lois très strictes sur l’avortement dans la région nordique. 

En Suisse, le mariage des couples de même sexe Slovénie  a suivi le mouvement en octobre, légalisant le mariage homosexuel après un arrêt de la Cour constitutionnelle.

De même que Cuba qui, par référendum, a adopté un nouveau code des familles qui ouvre le mariage et l’adoption à « toutes les personnes » !

Des lois et des résolutions essentielles ont été adoptées par des gouvernements

Le travail d’Amnesty International a contribué à l’adoption de lois et de résolutions essentielles, mais aussi à ce que les entreprises prennent plus au sérieux leurs obligations en termes de droits humains et soient amenées à rendre des comptes. 

En Inde, la Cour suprême a remporté une victoire pour la protection et la promotion du droit à la liberté d’expression en suspendant la loi relative à la sédition datant de 152 ans

Aux États-Unis, une loi sur les violences par armes à feu, pour laquelle Amnesty International États-Unis et ses partenaires faisaient campagne depuis longtemps, a été adoptée. 

Au Sahel, notre travail de plaidoyer pour protéger les enfants dans les zones de conflit du Niger  s’est traduit par un renforcement de la surveillance de la situation par l’ONU. En juillet, le secrétaire général de l’ONU a demandé à sa représentante spéciale de « promouvoir une capacité de surveillance renforcée dans la région du Sahel central », qui couvrirait la région tri-frontalière du Niger – l’une des principales recommandations de notre rapport paru en septembre 2021. 

À notre demande, les autorités de Sierra Leone  ont invité la société minière Meya, qui déploie ses activités dans le district de Kono, à répondre à nos préoccupations quant à l’impact négatif de ses activités sur les populations locales. La société a répondu qu’elle était engagée dans diverses actions visant à améliorer la sécurité des populations et l’accès à l’eau potable pour les habitant·e·s. 

Au Myanmar, grâce à notre enquête établissant un lien entre la chaîne d’approvisionnement en carburant d’aviation et des crimes de guerre commis par l’armée, plusieurs entreprises ont annoncé leur retrait des ventes de kérosène à ce pays. 

L’Union européenne est parvenue à un accord politique sur la Loi sur les services numériques ( Digital Services Act, DSA). Ce cadre réglementaire historique obligera, entre autres, les plateformes des géants technologiques à évaluer et gérer les risques systémiques posés par leurs services, tels que l’incitation à la haine et la diffusion de fausses informations. 

Des progrès notables ont également été enregistrés en matière de justice environnementale : l’Assemblée générale des Nations unies a adopté une résolution sur la reconnaissance universelle du droit à un environnement sain.

En 2023, le combat continue ! 

 

Que s’est-il passé cette année (2022) pour la Journée internationale de la paix

LIBRE CIRCULATION DE l’INFORMATIONS
Cette année, nous donnons des liens vers 293 actions menées dans 10 pays d’Europe occidentale et 126 dans 6 pays d’Europe orientale qui faisaient autrefois partie de l’Union soviétique. Nous relions 209 actions dans 7 provinces canadiennes et 44 des 50 états des États-Unis. Il y a 64 actions citées dans 16 pays d’Asie et du Pacifique, 52 dans 12 pays d’Amérique latine et des Caraïbes, 74 dans 30 pays africains et 28 dans 15 pays arabes et du Moyen-Orient. Voir le bulletin CPNN d’octobre pour un synopsis. Des données détaillées peuvent être trouvées dans les articles CPNN suivants :

EUROPE

PAYS EX-SOVIÉTIQUES

ÉTATS-UNIS ET CANADA

ASIE ET PACIFIQUE

ETATS ARABES ET MOYEN-ORIENT

AMÉRIQUE LATINE ET CARAÏBES

AFRIQUE

L’humanité n’est qu’à un malentendu de l’annihilation nucléaire, prévient le chef de l’ONU

DESARMAMENT & SECURITE .

Un article de Nations Unies

Alors que les tensions géopolitiques atteignent de nouveaux sommets et que certains gouvernements dépensent des milliards en armes nucléaires dans une fausse tentative de paix et de sécurité, les pays doivent respecter la norme de près de 80 ans contre leur utilisation, a déclaré le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, ce lundi (1 août) à New York.

Le chef de l’ONU s’exprimait à l’ouverture de la dixième conférence d’examen des parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), qui se déroule jusqu’au 26 août.

M. Guterres a souligné certains des défis actuels pour la paix et la sécurité mondiale, le monde étant soumis à un stress accru en raison de la crise climatique, des inégalités criantes, des conflits et des violations des droits de l’homme, ainsi que des ravages causés par la pandémie de Covid-19.

Le désarmement, pas la désunion

Il a déclaré que la réunion se déroulait au milieu de ces défis, et à un moment de danger nucléaire jamais vu depuis l’apogée de la guerre froide.

« Les tensions géopolitiques atteignent de nouveaux sommets. La concurrence l’emporte sur la coopération et la collaboration. La méfiance a remplacé le dialogue et la désunion a remplacé le désarmement. Les États recherchent une fausse sécurité en stockant et en dépensant des centaines de milliards de dollars pour des armes apocalyptiques qui n’ont pas leur place sur notre planète », a-t-il déclaré.

Actuellement, près de 13.000 armes nucléaires sont détenues dans les arsenaux du monde entier, a-t-il ajouté.

« Tout cela à un moment où les risques de prolifération augmentent et où les garde-fous pour empêcher l’escalade s’affaiblissent. Et quand les crises – avec des sous-entendus nucléaires – s’enveniment, du Moyen-Orient à la péninsule coréenne. A l’invasion de l’Ukraine par la Russie, et à de nombreux autres facteurs dans le monde ».

M. Guterres a déclaré qu’aujourd’hui, l’humanité n’était « qu’à un malentendu, à une erreur de calcul de l’anéantissement nucléaire ».

Une nouvelle voie

Le Secrétaire général a souligné l’importance du traité de non-prolifération, affirmant qu’il était « plus que jamais » nécessaire, tandis que la réunion d’examen offre l’occasion « d’engager l’humanité sur une nouvelle voie vers un monde exempt d’armes nucléaires ».

Il a présenté cinq domaines d’action, à commencer par le renforcement et la réaffirmation de la norme contre l’utilisation des armes nucléaires, qui nécessite un engagement ferme de toutes les parties au traité.

« Nous devons renforcer toutes les voies de dialogue et de transparence. La paix ne peut s’installer en l’absence de confiance et de respect mutuel », a-t-il déclaré.

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Question for this article:

Can we abolish all nuclear weapons?

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Les pays doivent également « travailler sans relâche » pour atteindre l’objectif d’élimination des armes nucléaires, ce qui commence par un nouvel engagement à réduire leur nombre.

Cela implique également de renforcer les accords et cadres multilatéraux sur le désarmement et la non-prolifération, ce qui inclut le travail important de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). 

S’attaquer aux tensions latentes

Pour son troisième point, M. Guterres a mis l’accent sur la nécessité d’aborder les « tensions latentes » au Moyen-Orient et en Asie. 

« En ajoutant la menace des armes nucléaires à des conflits durables, ces régions se rapprochent de la catastrophe. Nous devons redoubler notre soutien au dialogue et à la négociation pour apaiser les tensions et forger de nouveaux liens de confiance dans des régions qui en ont trop peu vu », a-t-il déclaré.  

Le Secrétaire général a également appelé à promouvoir l’utilisation pacifique de la technologie nucléaire, par exemple à des fins médicales, en tant que catalyseur pour faire progresser les Objectifs de développement durable (ODD).

Enfin, il a exhorté les gouvernements à remplir tous les engagements en suspens dans le cadre du traité, « et à faire en sorte qu’il reste adapté en ces temps difficiles ».

Une dimension inattendue

Directeur de l’AIEA, l’organisme de surveillance nucléaire des Nations Unies, a expliqué que le « spectre de la guerre » avait conféré une dimension nouvelle et inattendue à la sûreté nucléaire en Ukraine.

Rafael Mariano Grossi a déclaré qu’au début du conflit, qui dure maintenant depuis près de six mois, il avait énoncé les sept piliers de la sûreté nucléaire qui ne devraient jamais être violés. Il s’agit notamment de respecter l’intégrité physique des centrales nucléaires et de veiller à ce que le personnel puisse exercer ses fonctions sans pression indue.

« Ces sept principes ont tous été foulés aux pieds ou violés depuis le début de cet épisode tragique », a-t-il déclaré lors de la conférence.

Si l’AIEA a pu travailler avec l’Ukraine pour restaurer les systèmes de la centrale nucléaire de Tchernobyl, site de la catastrophe de 1986, M. Grossi continue de faire pression pour une mission à la centrale de Zaporizhzhya, la plus grande du pays, occupée par les forces russes.

« Mesdames et Messieurs, nous sommes prêts à partir », a-t-il déclaré. « Nous espérons pouvoir venir à Zaporizhzhya parce que si quelque chose s’y passe, nous ne pourrons nous en prendre qu’à nous-mêmes. Ce ne sera pas un tremblement de terre ni un tsunami qui seraient à blâmer, seulement notre propre inaction. »

L’Iran et la Corée du nord 

M. Grossi a également abordé d’autres questions, notamment celles liées à la surveillance du programme nucléaire iranien.

« Nous savons que pour être en mesure de donner les assurances nécessaires et crédibles que toute activité en République islamique d’Iran est à usage pacifique, nous devons travailler en collaboration(s) avec eux », a-t-il déclaré.

« C’est possible, nous l’avons fait dans le passé, mais nous avons besoin – et je le dis très clairement – nous avons besoin d’un accès qui soit à la mesure de l’ampleur et de la profondeur de ce programme nucléaire ».

La situation en République démocratique de Corée (RPDC) reste également préoccupante, et il a exprimé l’espoir que les inspecteurs de l’AIEA puissent retourner dans le pays.

(Merci à Sarah Guerard pour avoir envoyé cet article à CPNN.)

La Via Campesina appelle les États à sortir de l’OMC et à créer un nouveau cadre basé sur la souveraineté alimentaire

. . DEVELOPPEMENT DURABLE . .

Un communiqué de presse le 15 juin 2022 de Via Campesina

La Via Campesina, le mouvement paysan mondial représentant les voix de plus de 200 millions de petit·es paysan·nes d’Asie, d’Afrique, d’Europe et des Amériques, a été mobilisé toute cette semaine contre l’OMC. La crise alimentaire qui frappe le monde aujourd’hui est une preuve supplémentaire que le libre-échange – loin d’apporter la sécurité alimentaire – affame les peuples.

L’Organisation mondiale du commerce a une fois de plus échoué à proposer une solution permanente quant aux stocks publics à des fins de sécurité alimentaire. Depuis plus de huit ans, les pays riches bloquent les propositions concrètes des membres africains et asiatiques du G33 à cet égard.

Jeongyeol Kim, de l’Association Coréenne des Femmes Paysannes et membre du Comité de coordination international (CCI) de La Via Campesina, remarque que :

« Le libre-échange affame. Après 27 ans sous le règne de l’OMC, cette conclusion est sans appel. Il est temps de sortir l’agriculture de tous les accords de libre-échange. La pandémie, ainsi que l’impact et les perturbations induites par la guerre ont montré clairement que nous avons besoin d’un système de gouvernance alimentaire local et national basé sur les personnes, et non sur les agro-industries. Un système qui soit construit sur des principes de solidarité et de coopération plutôt que sur la concurrence, la coercition et les agendas géopolitiques. »

Burry Tunkara, de l’Organisation gambienne des petit·es paysan·nes, des pêcheur·euses et des forestier·ères et une des principales jeunes leaders de La Via Campesina, fait écho à ce même sentiment dans ce témoignage :

« L’OMC ne défend que les riches et leurs intérêts commerciaux. Il s’agit d’un outil du néo-colonialisme. Elle sert seulement les intérêts des multinationales pour trouver de nouveaux marchés et une main-d’œuvre moins chère. Il est temps de mettre un terme cela ! »

L’agenda socio-économique des pays les plus pauvres et à faible revenu n’est pas la priorité de l’OMC. La preuve : son incapacité à fournir un mécanisme de sauvegarde contre le « dumping » des pays riches et son approche des subventions à la pêche au détriment des petit·es pécheur·euses. Il ne sert à rien d’essayer de réformer une institution construite pour favoriser les intérêts commerciaux d’une poignée d’entreprises multinationales.

Perla Álvarez du Paraguay, et membre de la Coordination Latino-Américaine de La Via Campesina (CLOC) a déclaré qu’un changement systémique est urgent et nécessaire :

« La crise alimentaire mondiale est un moment de vérité pour nous. Il n’y a pas de place pour l’approche “business as usual”. Nous présentons des propositions à court et à long terme qui peuvent changer radicalement la façon dont le commerce affecte les communautés paysannes à travers le monde. »

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(Cliquez ici pour une version anglaise de cet article. ou ici pour une version espagnole.)

Questions for this article:
 
What is the relation between movements for food sovereignty and the global movement for a culture of peace?

(. . . suite)

Aujourd’hui, le 15 juin, depuis Genève, alors que la Conférence ministérielle de l’OMC a une nouvelle fois trahi les attentes des populations les plus touchées par la crise alimentaire, nous, La Via Campesina, partageons nos propositions.

La Via Campesina appelle tous les gouvernements nationaux à reconstituer des stocks publics et à soutenir la création de réserves alimentaires au niveau communautaire avec des produits locaux issus de pratiques agroécologiques. Il a également appelé tous les gouvernements à mettre en place une législation anti-dumping, nécessaire pour empêcher les exportateurs de détruire les marchés locaux.

Yudhvir Singh de l’Union Bhartiya Kisan, qui fait partie des syndicats qui ont formé le fer de lance de la mobilisation historique des paysan·nes indien·nes en 2021, présente l’expérience de son pays avec les stocks publics alimentaires :

« Les paysan·nes ont besoin de politiques publiques fortes comme le prix minimum et le stock public pour continuer à vivre décemment en produisant des aliments. Les attaques de l’OMC contre notre modèle de régulation des marchés sont extrêmement dangereuses. Le G33 doit continuer à résister et à construire sur la base des aspirations et des espoirs des petit·es producteur·trices. »

La Via Campesina a demandé une suspension immédiate de toutes les règles existantes de l’OMC qui empêchent les pays de développer des stocks publics alimentaires et de réguler le marché et les prix. Les gouvernements doivent avoir le droit d’utiliser des critères choisis par eux-mêmes pour protéger et promouvoir leur souveraineté alimentaire. Chaque pays doit pouvoir développer sa propre politique agricole et alimentaire et protéger les intérêts de ses paysan·nes, sans nuire aux autres pays. L’utilisation de produits agricoles pour les agro-carburants doit être interdite. La Via Campesina a également appelé à stopper la spéculation.

« La réforme agraire est nécessaire pour construire la souveraineté alimentaire », a ajouté Zainal Arifin Fuat de Serikat Petani Indonesia et membre du Comité de Coordination International de LVC.

« Les gouvernements doivent mettre fin à l’accaparement de l’eau, des semences et des terres par les sociétés transnationales et garantir aux petit.es producteur·trices des droits équitables sur les biens communs. »

Nous, La Via Campesina, insistons pour que, dans le cadre de la pandémie et de la crise mondiale de l’approvisionnement, les gouvernements donnent la priorité aux marchés locaux.

Morgan Ody, paysanne en Bretagne, France, et coordinatrice générale de La Via Campesina, a déclaré au nom du mouvement paysan mondial :

« L’Organisation mondiale du commerce est un projet qui a échoué. Notre mouvement paysan mondial appelle tous les États, en particulier ceux du Sud, à quitter l’OMC immédiatement. Il faut créer un nouveau cadre international pour l’agriculture et le commerce fondé sur la souveraineté alimentaire. C’est seulement ainsi que nous pourrons défendre les intérêts des petits producteurs alimentaires. »

Pour toute question, écrivez à press@viacampesina.org

Note de l’éditeur : La Via Campesina compte parmi ses membres 181 organisations paysannes dans plus de 80 pays. Le réseau paysan mondial et ses alliés ont mené les négociations à l’ONU pendant 17 ans, ce qui a conduit les Nations Unies à adopter la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des Paysans et Autres Personnes Travaillant dans les Zones Rurales (UNDROP) en 2018.